Supernova - Dimitri Kantcheloff
L'air de ne pas y toucher ce premier roman au titre trompeur - il ne s'agit nullement de science-fiction ou de voyage interstellaire - met le doigt sur l'un des questionnements les plus actuels pour l'espèce humaine. Rappelez-vous le premier confinement, le vrai. La vie qui s'arrête. Le calme, le chant des oiseaux dans les rues des villes désertées par les bruits habituels des activités quotidiennes. Des voix pour dire que le monde d'après serait différent... Bref. Nous n'en sommes plus là. Les seules aspirations des uns et des autres sont désormais de vite retrouver le bruit et la fureur, d'en finir avec ce (relatif) calme forcé. Pourtant, certains s'acharnent encore à préférer le calme et l'isolement à l'agitation de rigueur un peu partout. A leurs risques et périls.
C'est le cas de Charles qui a choisi un village reculé du sud de la France, une maison isolée pour passer tranquillement ses dernières années sur Terre après une vie dans ses entrailles à conduire des métros. Désormais, il a les yeux tournés vers le ciel et les étoiles. Il passe ses nuits à assouvir sa passion, rivé à son télescope. Jusqu'au jour où il découvre une supernova. Pour les novices, il s'agit de l'explosion d'une étoile en train de mourir. Celle-ci est spectaculaire, elle continue à briller en plein jour. Il n'en faut pas plus pour affoler les rédactions qui dépêchent leurs fins limiers pour tenter de dénicher la cachette de Charles et obtenir son témoignage. Parmi eux, Chloé, journaliste à l'AFP, d'habitude en charge des faits divers mais qui saisit l'opportunité de revenir sur les lieux de son enfance. Ancienne reporter de guerre, la jeune femme a vite fait de découvrir l'antre du vieil homme. Le face à face espéré vire à la traque dans des paysages grandioses auxquels Charles semble le seul à accorder de l'importance. La rencontre finale sera explosive.
Avec ce texte, l'auteur pointe du doigt l'absurdité de nos comportements. Pour cela il nous invite à nous remettre la tête dans les étoiles, à contempler notre insignifiance à l'échelle de l'univers. A méditer sur la vacuité de l'existence lorsque l'humain n'a plus conscience d'appartenir à un ensemble. Sur le vide sidéral qui préside à la folle course médiatique et toute l'arrogance de l'espèce humaine à consommer et jeter illico, y compris l'information. Dans ce texte s'opposent le bruit et le silence, la soumission invisible et le farouche désir liberté. Personnellement je suis chaque jour de plus en plus désespérée de constater à quel point il est difficile d'avoir la paix, de s'isoler dans un paysage, de fuir le bruit, de simplement contempler. Je me suis sentie en totale empathie avec Charles, vous voilà prévenus.
"Supernova" - Dimitri Kantcheloff - Les Avrils - 192 pages