Un café et deux chouquettes avec... Guillaume Sire
Il est 9h30 en ce 9 octobre, le soleil a décidé de s'installer pour le week-end et réchauffe déjà la toile blanche des chapiteaux qui accueilleront pendant deux jours les auteurs invités au Salon du Livre du Mans. Pour Guillaume Sire, c'est une première. Les Contreforts est son cinquième roman mais il n'avait encore jamais eu l'honneur des festivités mancelles. Une aubaine pour moi qui le lis depuis Où la lumière s'effondre avec un plaisir renouvelé à chaque parution. Nous nous étions croisés rapidement à Livre Paris il y a plus de deux ans, au moment de Réelle. Ensuite, il y a eu la jolie récompense du Prix Orange du Livre en 2020 pour le bouleversant Avant la longue flamme rouge, malheureusement privé de rencontres en librairie par les mesures sanitaires. Beaucoup de lecteurs ont découvert Guillaume Sire à cette occasion. Ils vont à présent se rendre compte qu'il n'écrit jamais le même livre, qu'à chaque fois il nous entraîne dans un univers totalement différent et qu'en plus, il le fait exprès.
Il arrive en avance, un grand sourire aux lèvres, l’œil qui pétille et l'accent du sud-ouest accroché aux premières paroles. Content d'être là, encore frais avant que ne commence le marathon du week-end avec ses différentes sollicitations. Content aussi de l'accueil réservé à ce nouveau roman dans lequel il assume une nouvelle liberté découverte avec Avant la longue flamme rouge : celle de se laisser aller à raconter des histoires, sans forcément s'appuyer sur une pensée ou une démonstration intellectuelle. C'est à Lisa Liautaud qu'il le doit, et il est intarissable sur sa relation avec son éditrice qui s'est construite au fil des années et de 4 romans. "Précieuse" dit-il de celle qui pointe très exactement ce qui ne va pas et le laisse ensuite trouver la solution. "Et ça marche" rigole Guillaume qui de son côté ne rechigne jamais à recommencer dix fois s'il le faut. D'ailleurs, s'il devait conseiller un aspirant écrivain, c'est la seule chose qu'il se sentirait capable de lui dire, d'être prêt non pas à boucler un texte mais à le boucler dix fois avant qu'il ne soit abouti.
Guillaume Sire est un homme curieux, il a besoin de découvrir, d'explorer. Toujours en quête d'une matière dont il pourra faire quelque chose. C'est peut-être son secret, ce moteur qui fait pétiller l'envie et relègue très loin l'ennui, ce qui rejaillit sur le lecteur. Lorsqu'il raconte les influences, les inspirations de lieux ou de personnalités qui ont présidé à la rédaction des Contreforts, le plaisir du jeu se lit dans ses yeux. Il est déjà dans le projet suivant mais bien loin encore de l'écriture. Pour l'instant, c'est la phase recherche, imprégnation. Il se nourrit. Comment fait-il ? Entre l'enseignement à l'Université de Toulouse et ses 3 enfants dont il adore s'occuper ? Aucun problème, il adore bosser au milieu des gamins qui jouent. Tout est lié pour lui, tout se rejoint dans le bruit de la vie. En principe, le prochain roman aura l'océan pour décor, encore du nouveau, bien loin de l'ancrage terrien des Contreforts. Mais Guillaume Sire compte bien prendre son temps et profiter de cette phase d'exploration qui le réjouit.
Oui, Guillaume Sire est un homme curieux et on en arrive assez vite à s'éloigner du sujet - lui - pour papoter de tout et de rien. Enfin surtout de littérature. Il a lu et adoré Francis Rissin, bien sûr, bon point pour lui. Mais en étant programmé au cœur de la rentrée littéraire il s'est aussi un peu pris au jeu. Lire la presse littéraire et suivre quelques prescripteurs a fini par lui donner envie de découvrir certains livres. Et nous voilà partis à échanger sur Le voyant d’Étampes, pour lequel nous utilisons à peu près les mêmes qualificatifs. On se retrouve également autour de Richard Powers. Dans la foulée j'aurai droit à quelques potins croustillants que je vais garder pour moi. On pourrait continuer longtemps. Pour l'heure, on l'attend sur son stand, et un peu plus tard dans l'après-midi pour une rencontre avec Jean-Baptiste Del Amo puisqu'ils ont en commun dans leurs deux romans des décors naturels somptueusement racontés et mis en scène. Il espère avoir le temps de croiser Jérémy Fel dont il suit régulièrement les conseils de lecture sur son fil Facebook. Et puis Guillaume Sire s'en ira poser son regard curieux sur d'autres paysages, d'autres couleurs qui viendront nourrir son imaginaire et irriguer sa plume. Pour notre plus grand bonheur.
(on attend le prochain)