Le Mal-épris - Bénédicte Soymier
22 Février 2021 , Rédigé par Nicole Grundlinger Publié dans #Romans
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Dès le prologue, la tension est palpable. Les mots sont précis, on pourrait les entendre résonner dans la tête de l'auteure puis sentir leur impact lorsqu'elle les pose sur la feuille. Dès le prologue, mon attention est captée. Je trouve le choix courageux, mettre en scène un héros détestable, obliger le lecteur à le regarder en face sans détourner les yeux. Jouer un tant soit peu sur la fascination qu'exercent les "monstres" sur le commun des mortels tout en s'attachant à montrer qu'il n'y a pas de monstre dans la plupart des cas, mais un homme. Paul est laid, mal fagoté, solitaire et complexé. Mais Paul est un homme avec ses failles, son passif affectif, ses frustrations, son vaste désir d'aimer et d'être aimé. Paul est mal au monde. Mal aux autres.
"C'est donc ça la vie, une grande farce hypocrite dans laquelle il faut se fondre pour ne pas être méprisé. Il écoute, regarde, s'adapte. Il apprend, la nausée au bord des lèvres face à ce fourbe étalage, à cette course à l'apparence, à cet attrait de l'enveloppe alors qu'au fond il sait être le même".
Dans un style clair, dépouillé, à base de phrases courtes et percutantes, Bénédicte Soymier nous raconte Paul et Angélique. La séduction, l'obsession puis la violence. La détresse affective. Sans fausse complaisance, sans aucune naïveté, sans excuse bidon. Paul ressasse un précédent revers amoureux, une vraie claque. Mais la violence vient de plus loin, il le sait, même s'il ne peut l'empêcher de le submerger. Angélique est sexy, cible du regard des hommes et pourtant si inquiète d'être seule, si désireuse d'être aimée. Les conditions sont réunies, c'est l'escalade. Paul ressasse ses rancoeurs, Angélique accepte l'inacceptable jusqu'à ce qu'elle trouve la force d'en sortir. Paul est mal-épris, mais Angélique aussi.
"Angélique veut rester seule, vraiment seule, pour la première fois dans le silence. Les autres souvenirs remisés au sous-sol, la tête claire, pour enfin s'approprier l'idée de son importance".
Car dans toute relation, douce ou brutale, il y a deux acteurs. Bénédicte Soymier le montre très bien, décortique l'engrenage de la violence qui se nourrit des peurs de l'une et de la colère de l'autre. La réussite de ce convaincant premier roman est de parvenir à faire exister et ressentir les deux protagonistes. Mieux que ça, à susciter de l'empathie pour les deux et le malaise qui va avec. Car sa démonstration est limpide, servie par un travail d'écriture prompt à s'effacer pour laisser place aux émotions du lecteur et maintenir une tension narrative jusqu'à la dernière ligne. Qui claque comme un dernier uppercut.
"Le Mal-épris" - Bénédicte Soymier - Calmann-Lévy - 248 pages
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