Le dernier lapon - Olivier Truc
Le libraire qui a choisi ce livre dans le cadre de mon abonnement Kube a été doublement bien inspiré : j'ai autant apprécié le dépaysement offert par cette lecture que son climat rafraichissant dans un contexte caniculaire. Les -30° de l'intrigue m'ont presque fait mieux supporter les 38° de mon atmosphère. Ceci dit, je me suis glissée avec beaucoup de plaisir dans cette histoire pleine de surprises et de découvertes, aux confins du continent européen où malgré les différences de culture et de conditions de vie, on s'aperçoit que les vicissitudes du genre humain sont identiques partout dans le monde.
On apprend donc qu'en Laponie, il existe une police des rennes chargée de régler les conflits entre éleveurs et de veiller à ce que les droits de chacun soient respectés. Une activité qui s'exerce sur de vastes territoires sauvages appartenant à 4 pays différents, la Suède, la Finlande, la Norvège et la Russie. Des territoires (et une culture) menacés par le monde moderne, les chercheurs de minerais et autres richesses ; des traditions en voie de disparition, un peuple Sami méprisé et persécuté durant des siècles. Et grâce à l'intrigue concoctée par Olivier Truc, on découvre tout un monde fascinant au coeur d'un espace-temps où l'on se déplace à dos de scooter des neiges sur des distances qui imposent des jours de voyage dans une nuit quasi permanente illuminée parfois de quelques aurores boréales.
Nous suivons le tandem d'enquêteurs formé par Klemet Nango et Nina Nansen. Klemet est un lapon éloigné des traditions, un rien désabusé tandis que la jeune Nina, fraichement diplômée de l'école de police suédoise assure sa première affectation. Opposition de styles et de cultures comme tout bon duo dont les membres apprendront à se connaître et à se compléter intelligemment. Pour cela, ils auront le temps d'une enquête complexe mêlant le vol d'un tambour lapon (rare objet artisanal dont il ne reste que quelques dizaines d'exemplaires dans le monde) et le meurtre d'un éleveur de rennes. Alors qu'une conférence de l'ONU sur la protection des populations autochtones se profile, Kemet et Nina sont pressés par leur hiérarchie de résoudre vite fait ces deux crimes pour ne pas attirer le regard de la communauté internationale sur la situation des lapons.
Le dernier lapon est vraiment le genre de polar que j'aime lire car il me donne l'occasion d'appréhender un pays, une histoire, une culture de façon divertissante. On découvre ici la complexité historique de ces territoires nordiques soumis à de multiples influences, notamment religieuses (ce qui transparait dans pas mal de polars nordiques d'ailleurs, je pense à Asa Larson en particulier), mais aussi les comportements dramatiques envers les populations aborigènes, les mêmes que l'on a pu observer en Australie ou avec les indiens d'Amérique. C'est très instructif.
Une bonne pioche, donc. Dans la lignée d'un Yeruldegger, en beaucoup moins violent mais tout aussi dépaysant. Une lecture qui donne en plus très envie de partir à la rencontre des éleveurs de rennes et de se plonger dans les vastes étendues blanches et gelées.
"Le dernier lapon" - Olivier Truc - Points (Editions Métailié) - 572 pages