On la trouvait plutôt jolie - Michel Bussi
Je suis loin d'avoir lu tous les livres de Michel Bussi, auteur très prolixe. Mais le fait d'avoir produit Nymphéas noirs me l'a rendu définitivement sympathique ce que quelques rencontres et discussions avec lui n'ont pas démenti. Je ne vais pas disserter sur ses qualités littéraires, ce n'est pas le sujet. Une écriture neutre, histoire de se fixer sur l'intrigue. Ce que j'aime chez lui : sa sincérité et son désir manifeste de toujours surprendre son lecteur. Désormais, j'entre dans un livre de Bussi comme dans un jeu. Et j'ai beau tenter de faire attention, de me concentrer pour ne pas me faire avoir... Il m'a encore roulée dans la farine, le bougre !
Il y a d'abord la surprise du contexte, celui de la méditerranée et des migrants. On ne fait pas dans la légèreté comme peut d'ailleurs l'indiquer le titre extrait d'une chanson de Pierre Perret (petit clin d’œil habituel de l'auteur) tout comme le prénom de son héroïne Leyli. Mère courage élevant seule ses trois enfants Alpha, Bamby et Tidiane dans l'appartement trop petit d'une cité HLM de Port de Bouc près de l'étang de Berre. Leyli a fui le Mali et la pauvreté, enchaîne les emplois de femme de ménage dans des hôtels, vient juste de trouver un CDI et attend désespérément l'attribution d'un logement plus grand. C'est justement dans un hôtel qu'est retrouvé le corps sans vie et exsangue d'un homme, employé d'une association d'aide aux migrants, Vogelzug. Très vite, les soupçons se portent vers une superbe jeune femme qui ressemble à Bamby mais ce n'est que le début d'une enquête à rebondissements menée par un duo de flics assez savoureux, le commandant Petar Valika et le lieutenant Julo Florès aussi différents physiquement que psychiquement.
Voilà. Une fois que je vous ai dit ça, vous vous faites une idée. Votre idée. En fonction de votre vécu, des images que vous avez dans la tête, votre cerveau avance tout seul, interprète les éléments qu'on sème sur son passage... Et c'est avec ça que joue Michel Bussi. Les apparences, les interprétations. Et il trouve ici un formidable matériau, celui de la mondialisation, de l'uniformisation des différents lieux dans le monde. Et vous... ben vous courez et vous vous faites avoir en beauté ! Néanmoins, au passage, il aura dessiné un monde dominé par l'argent, un monde dans lequel les êtres humains sont des marchandises comme les autres et où le règne du profit écrase tout le reste. On sent que l'auteur s'est suffisamment documenté sur le sujet et il suffit de faire appel à quelques souvenirs d'actualités récentes pour comprendre que la fiction est bâtie sur un fond de vérité.
Donc, je vous le dis, On la trouvait plutôt jolie est un bon cru dont on apprécie autant l'aspect ludique du jeu de pistes que le propos plus complexe que d'habitude ou encore le parti pris d'entrecouper le fil narratif par le récit de Leyli, dans la tradition orale africaine. Bien joué, Monsieur Bussi !
"On la trouvait plutôt jolie" - Michel Bussi - Presses de la cité - 464 pages