Richesse oblige - Hannelore Cayre
Je me réjouissais tellement de retrouver la plume acérée et le ton caustique d'Hannelore Cayre... Il est vrai que le souvenir d'une rencontre avec l'auteure en librairie associé à celui de La daronne avait tout pour me mettre en appétit. Pourtant, c'est la déception qui domine, à tous les niveaux. L'intrigue, l'écriture, le scénario... Je suis restée sur ma faim, un peu agacée de retrouver des mécanismes qui rappellent trop La daronne (le travail de l'héroïne qui lui permet de capter des informations clés, c'était déjà le cas), des actions à peine effleurées, des scènes juste esquissées. Je me souviens d'avoir au contraire beaucoup aimé la façon dont elle décrivait quelques scènes bien senties dans La daronne. Là, ça manque. La rapidité, le rythme effréné peuvent parfois être des atouts mais cette fois je trouve que l'auteure oublie d'installer un tant soit peu son récit et ses personnages, ça survole à toute vitesse avec des sabots un peu gros et à la fin, il ne reste pas grand-chose.
Pourtant, l'idée est intéressante. Ce parallèle entre deux époques, la nôtre et celle de la Commune en 1870, pour mieux montrer à quel point les choses ont peu changé en matière de différences de classes sociales et d'exploitation des pauvres au profit des riches. Pour cela, l'auteure embarque son héroïne, forte tête et fort caractère, Blanche de Rigny sur les traces de son aïeul, Auguste à la faveur d'une recherche généalogique qui pourrait servir son dessein : devenir enfin riche et sortir de l'état de précarité dans lequel elle vit avec sa fille, faute d'appartenir à la bonne branche de la famille. Il sera question des pratiques de cette époque, acheter des pauvres pour aller à la guerre à la place des riches, d'une île bretonne régentée par les femmes mais également de trafic de drogue et de carnets d'adresse monnayés aux dealers. Blanche, handicapée depuis un accident de voiture occupe en effet un emploi administratif dans les locaux de la P.J. et n'hésite pas à tirer quelque profit des données qu'elle a à traiter. Le duo qu'elle forme avec sa copine Hildegarde, militante de la cause animale ne passe pas inaperçu et pas grand-chose ne les arrête. Malgré ça...
Eh bien, malgré ça, je n'ai pas palpité. L'auteure n'y va pas avec le dos de la cuillère et la tonalité qui m'avait plu dans La daronne car elle servait une intrigue patiemment construite m'a ici quelque peu lassée. Trop d'éléments juste assénés en ce qui concerne la partie contemporaine. La narration est plus agréable dans la partie 19ème siècle, un poil plus fouillée. Mais l'ensemble m'a laissé une impression de fourre-tout dont j'ai finalement du mal à retenir un ou deux moments clé alors que pour La daronne, j'ai encore en tête quelques scènes savoureuses (j'ai d'ailleurs hâte de découvrir le film qui aurait dû sortir en mars avec Isabelle Hupert dans le rôle-titre). Dommage. Le propos est noyé sous trop de faits qui se bousculent sans qu'on ait réellement le temps d'assimiler comment tout ceci s'emboîte. Bref, une déception.
"Richesse oblige" - Hannelore Cayre - Métailié - 220 pages
Delphine, qui n'avait pas lu La Daronne avait sans doute moins d'attentes que moi, et sur Babelio, parmi un florilège de très bons avis, quelques-uns rejoignent tout de même le mien.