Les disparus du phare - Peter May
Il est sympa Peter May. Il a pensé à tous les accros à sa Trilogie écossaise en manque de bourrasques et de feux de tourbe. Il suffit de regarder la couverture pour que la réminiscence de ces heures de lecture s'invite à notre esprit et que le désir de retourner prendre un bon bol d'air dans les Hébrides Extérieures se fasse sentir. Alors même si l'intrigue est un peu moins originale, même si le voyage est un peu plus rapide et s'attarde moins sur les habitants de l'île, je n'ai pas boudé mon plaisir.
On sait depuis L'homme de Lewis que Peter May excelle à explorer les méandres d'un esprit troublé (en l'occurrence celui d'un vieillard atteint d'Alzheimer). Il n'éprouve donc aucune difficulté à se glisser dans la peau d'un homme rendu amnésique par un choc dont il ignore jusqu'à l'origine. Une entrée en matière plutôt réussie, cet homme échoué sur une plage de Lewis battue par les vents, qui ne se rappelle même pas comment il s'appelle ni où il habite. Se laissant guider par ses voisins qui eux, semblent parfaitement le connaitre, il part à la découverte de... lui-même. Et plus il avance, plus le mystère s'épaissit. Est-il vraiment cet universitaire en congé sabbatique venu s'installer dans l'île pour écrire l'histoire de la légende des "disparus du phare", trois gardiens de phare des îles Flannan, en face de Lewis disparus mystérieusement au début du 20ème siècle ? Dans ce cas, pourquoi ne trouve-t-il aucune trace de ses écrits ? Mais le pire est ce sentiment qui l'obsède, la peur d'avoir commis un acte affreux et de ne pas s'en souvenir. Lorsque la police vient l'interroger au sujet d'un cadavre retrouvé sur une des îles Flannan, il se demande s'il n'est pas l'auteur de ce meurtre. Mais à ce stade, on est encore très loin de la vérité...
C'est amusant, le début m'a beaucoup fait penser au premier tome de la série des William Monk d'Anne Perry, Un étranger dans le miroir où le héros se réveille amnésique et découvre peu à peu sa personnalité à travers le regard et le ressenti de ceux qu'il côtoyait. Là aussi, celui qui semble s'appeler Neal McLean entreprend ce même chemin en tentant de faire la part des choses entre ce qu'on lui renvoie et ses propres sensations sur lesquelles il ne met pas forcément d'explications ou d'images. C'est très intéressant, très documenté notamment sur le fonctionnement de la mémoire. Et puis tout s'emballe, les règles du polar se mettent en place, l'action s'accélère, on entre dans le vif du sujet. Inutile de vous dire que l'on ne s'ennuie pas.
Cet opus permet à Peter May d'aborder une thématique d'actualité, la protection de la planète et plus particulièrement des abeilles sans lesquelles la vie sur Terre serait grandement déséquilibrée. Un sujet qui fait écho à de nombreux reportages vus ces derniers temps et contribue à ancrer l'intrigue dans une réalité très crédible. Et puis il est malin Peter May. Il trouve le moyen de nous donner des nouvelles de Fin, oh juste un petit clin d'oeil, à peine une apparition, histoire de confirmer au lecteur qu'il est au bon endroit et que peut-être, un jour, on le retrouvera pour de bon ce Fin McLeod.
En attendant, n'hésitez pas à embarquer, couvrez-vous et laissez-vous mener par ce bon trousseur d'intrigue qu'est l'auteur. Un petit whisky est autorisé.
"Les disparus du phare" - Peter May - Le Rouergue noir - 318 pages (traduit de l'anglais par Jean-René Dastugue)