Nulle part où revenir - Henry Wise

2 Novembre 2025 , Rédigé par Nicole Grundlinger Publié dans #Polars

La réussite de ce roman noir bien tassé et sans sucre tient beaucoup à son décor. Le comté d'Euphoria en Virginie, ce coin "où les gens semblaient tous vivre avec un sentiment d'échec, auto-infligé ou hérité. Les Blancs avaient eu leur cause perdue, les Noirs l'esclavage. On aurait pu penser que tout les destinait à s'affronter mais en fait ils étaient tapis au fond de la même tranchée, à l'abri du reste de l'Etat, du reste du pays". Peu de place à l'espoir dès le départ. Les descriptions de l'auteur sont aussi viscérales que le rapport qu'il semble entretenir avec l'endroit. Décrépitude des bâtiments des anciennes plantations, comportements influencés par la couleur de peau, paysages de champs de tabac ou encore marais isolés repaires de pauvreté... la plume d'Henry Wise est irriguée de vécu et livre des images saisissantes.

Pour Will Seems, le territoire est synonyme de remords et de culpabilité ; une force souterraine l'a poussé à revenir après dix ans d'exil à Richmond. Un autre monde. La propriété familiale baptisée Terre promise tombe en ruines, il y campe mais passe ses nuits d'insomnie en voiture près du lieu où sa vie et celle de son copain Sam on basculé en un instant treize ans auparavant. Employé au bureau du shériff, Will se trouve directement confronté au passé lorsque Tom Janders, un autre de ses amis d'enfance est retrouvé mort, poignardé dans sa maison en flammes. Suspect trop évident, secrets enfouis jusqu'aux tréfonds du Snakefoot, marais oublié "où cohabitent des descendants d'esclaves évadés et le pire de la misère blanche", rivalités, obstruction... l'enquête se perd dans le brouillard des non-dits avant qu'une détective obstinée ne s'en mêle. Mais le lieu semble plus fort que les hommes, le moindre espoir est vite balayé par le poids de la culpabilité et de l'Histoire. S'en extraire est une gageure lorsque le corps et l'esprit sont à ce point gagnés par la noirceur. Et le titre prend alors tout son sens.

Du très bon noir qui colle au cœur et au corps, envoie des images plein écran et convoque les fantômes qui hantent nos esprits. On n'en a sûrement pas fini avec la noirceur du sud des États-Unis qui inspire de nouvelles plumes au fil des années. A suivre, donc.

"Nulle part où revenir" - Henry Wise - Sonatine - 426 pages (traduit de l'anglais (EU) par Julie Sibony)

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zazy

02/11/2025 19:28

Plsu que tentant, cela pourrait vraiment me plaire

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Nicole Grundlinger

04/11/2025 14:03

Je lis assez peu de noir mais en principe avec Sonatine ça fonctionne bien :-)

Ingannmic

02/11/2025 11:20

Très tentant... l'atmosphère de déréliction, la noirceur, c'est le genre de texte que j'aime !

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Nicole Grundlinger

02/11/2025 16:48

Alors fais-toi plaisir ;-) J'avoue que j'admire la capacité de Sonatine à sans cesse dénicher de nouveaux auteurs de qualité qui auscultent les noirceurs de l'Amérique.

Cath L

02/11/2025 09:12

Je n'avais pas réalisé que c'était un auteur de premier roman... à noter, j'en suis curieuse !

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Nicole Grundlinger

02/11/2025 16:42

Oui ! Et dont la qualité de plume a incité l'éditeur à le publier en Rentrée littéraire :-)

je lis je blogue

02/11/2025 08:41

L'ambiance semble pesante et la couverture reflète bien cette impression. Je n'ai rien contre une intrigue bien sombre de temps en temps

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Nicole Grundlinger

02/11/2025 16:41

Pareil pour moi et dans ce cas j'ai assez confiance en Sonatine pour dénicher de nouveaux auteurs prometteurs.