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Lorsque le dernier arbre - Michael Christie

18 Août 2021 , Rédigé par Nicole Grundlinger Publié dans #Romans, #Coups de coeur

Ce n'est pas tous les jours que l'on tombe sur une fresque de cette ampleur, qui s'étend sur plus d'un siècle et entremêle le destin d'une famille à celui des arbres. Michael Christie est canadien, c'est son premier roman publié en France, on reconnait la patte américaine, construction au cordeau et parfait dosage des éléments romanesques. Je m'y suis immergée avec bonheur, autant pour le grand bol de verdure que pour le questionnement induit sur l'avenir du monde que nous façonnons.

Imaginez. Nous sommes en 2038, presque tous les arbres ont disparu, frappés par une succession d'épidémies, le Grand Dépérissement. Les conséquences sur les vies humaines ont été catastrophiques, apparition de nouvelles maladies, orages de poussière... bref, l'état de la planète laisse à désirer. Au nord de Vancouver, sur une île de Colombie britannique on trouve l'une des dernières forêts primaires du monde, la cathédrale arboricole de Greenwood. Une sorte de sanctuaire que des "pélerins" viennent visiter, pour un bol d'air, une connexion avec cette nature que certains n'ont pas vraiment connue. Jake fait partie de l'équipe des guides, un boulot qui lui permet de respirer dans des conditions correctes, de tenter de rembourser un prêt étudiant qui l'étrangle, alors tant pis si elle est surdiplômée en botanique et dendrologie et si les conditions de travail ne sont pas idéales. Un jour, un de ses anciens petits amis débarque sur l'île. Devenu avocat, il lui annonce que cette île dont le nom est aussi son patronyme pourrait bien lui appartenir. Et voilà, c'est parti pour quelques bonds dans le temps, comme on remonte les cernes d'un tronc coupé, et qui vont nous conduire sur les traces des ancêtres Greenwood, jusqu'en 1908, là où tout a commencé, au milieu d'une forêt.

Ce qui est remarquable dans ce roman, c'est la façon dont l'auteur entrelace les destins, imbrique l'existence des hommes dans celle des arbres. Explore les ramifications, déterre les racines, nous parle d'ancrage et de vie. Nous plonge dans la valeur des forêts, fournisseurs de matière première à la construction, à l'ameublement, au chauffage au point d'en oublier leur existence propres et leurs besoins. Ce bois dont on fait le papier, les livres où s'écrivent les histoires des hommes qui n'ont de cesse de saccager ce qui leur est pourtant nécessaire. Chemin faisant, il éclaire toutes les contradictions qui jalonnent les parcours des hommes, toute la complexité humaine. Au fur et à mesure que se révèlent les liens et les histoires de cette famille, la fascination gagne, tout comme la conscience d'une appartenance à quelque chose de plus grand. Si l'on retrouve ici pas mal de thèmes abordés par Richard Powers dans L'Arbre-monde, la construction subtile et l'ampleur romanesque rendent la projection beaucoup plus évidente. Ce que revisite Michael Christie avec ce roman c'est la notion même de famille et d'appartenance, et il le fait de façon éclatante. Captivée à chaque étape de cette saga atypique, que l'on aurait tort de cantonner à son propos écologique, je l'ai terminée très émue et impressionnée. J'aime tellement quand la littérature me fait cet effet-là que je risque d'en parler encore longtemps.

"Lorsque le dernier arbre" - Michael Christie - Albin Michel - 590 pages (Titre original : Greenwood traduit de l'anglais (Canada) par Sarah Gurcel)

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F
Je me le suis finalement offert ????
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N
Bonne lecture alors ! J'espère que tu y prendras autant plaisir que moi.
D
Tu donnes très envie de découvrir ce roman à la thématique on ne peut plus d'actualité. J'aime bien l'idée de cet entrelacs narratif que tu évoques. Un procédé choisi aussi par Reverdy dans Climax... autre roman traitant des conséquences dramatiques du réchauffement climatique dû à l'activité humaine. ;-)
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N
Eh bien lorsque tu chercheras un pavé bien immersif et pas idiot à glisser dans ton sac pour le week-end, tu pourras compter sur celui-ci ; et de mon côté, j'inscris le Reverdy dans mon carnet de bal ;-)
R
Le descriptif donne tres envie de le lire
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N
C'est vrai que le pitch est tentant, et il tient toutes ses promesses.
F
Tout ce que j'aime! Et en plus tu cites L'arbre-monde, je ne peux pas résister;
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N
On reconnait forcément des thématiques de L'Arbre-monde mais c'est un livre très différent, plus fluide à lire et dans lequel il est beaucoup plus facile de s'immerger et d'éprouver de l'empathie pour les personnages. Tu verras.
K
Très convaincant, ce sujet de roman... me voilà tentée !
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N
Je pense qu'il devrait te plaire, en tout cas le contraire m'étonnerait beaucoup.
K
Je ne peux qu'aime ton billet, ah oui quel roman! A lire absolument.
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N
Je viens de découvrir le tien publié en parfaite synchronisation mais sans nous concerter... Un vrai plaisir de lecture à recommander sans compter.
K
Je t'ai lu en diagonale, ce roman m'attend sagement dans un coin de ma chambre... livre qui a échappé aux cartons (qui ne seront ouverts que dans un mois minimum) parce qu'il fait partie de mes priorités...
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N
En principe tu devrais y trouver ton compte, en tout cas je l'espère. Ça me rappelle mon déménagement de l'an dernier à la même époque, j'avais gardé un gros sac avec les livres que je voulais à tout prix lire... :-) On ne se refait pas.