Today, we live - Emmanuelle Pirotte
/image%2F0757919%2F20150925%2Fob_16d70f_9782749144344.gif)
La seconde guerre mondiale constitue une manne infinie d'inspiration pour les romanciers, tant le climat, le contexte ou les événements offrent de trames et d'angles de vue. Emmanuelle Pirotte choisit la fin de l'année 1944, période de chaos, entre avancée des alliés et baroud d'honneur des allemands pour conter une histoire qui s'intéresse avant tout aux femmes et aux hommes, plongés dans une Histoire qui les dépasse, exténués par cinq années d'un conflit dont ils n'ont pas toujours compris les enjeux. Au milieu de la laideur, elle fait jaillir une pointe d'espoir, comme un sursaut d'humanité au milieu d'une vaste boucherie. Et elle parvient à toucher autant qu'à surprendre.
Nous sommes donc dans les Ardennes belges, vastes étendues désolées parsemées de fermes alternativement occupées par les Américains et les Allemands qui se livrent encore une guérilla sans merci. Les habitants, eux subissent et tentent surtout de rester en vie. Dans l'une des fermes, une petite fille juive, Renée a été recueillie après la rafle de sa famille. Lorsque les allemands arrivent à proximité, le chef de famille la confie au curé du village qui lui-même la confie aux bons soins de deux américains croisés sur la route. Problème, ce sont en fait des nazis appartenant à une division spéciale chargée d'infiltrer les alliés. Alors qu'il s'apprête à exécuter la petite, Mathias est soudain frappé d'un sentiment inconnu et difficile à identifier. Il tue son compagnon et embarque la petite avec lui. Lui, le tueur, l'exécuteur de basses œuvres se retrouve tout à coup lié à une enfant qu'il n'a jamais vue auparavant et juive de surcroît. S'ensuit alors tout un périple qui les mène jusqu'à une ferme où ils trouvent refuge et où l'on pense que Mathias est vraiment américain. Jusqu'à ce que les américains arrivent...
L'attachement progressif entre l'homme et la petite fille, que tout éloigne mais qui pourtant se choisissent est une idée originale qui tend l'intrigue et également le prétexte pour montrer la complexité des situations et des sentiments au cours de cette période où tout n'était pas forcément blanc ou noir. Mathias lui-même est un personnage complexe, à moitié canadien par sa mère, entré en guerre plus par besoin d'action que par conviction. Renée est une petite fille forte, qui a grandi trop vite et qui voit en ce soldat un être à mi chemin entre le père et le prince charmant. Autour d'eux gravitent des êtres humains que l'origine ou l'appartenance à un pays ne suffisent pas à définir. Il y a des bons et des méchants dans chaque camp. L'auteure réussit son coup : puisque Renée a choisi Mathias, alors le lecteur la suit, malgré le pedigree et les antécédents du monsieur, malgré les informations qui parviennent progressivement aux oreilles des protagonistes avec notamment la découverte des camps de concentration.
Avec Today, we live, l'auteure nous offre un point de vue intéressant, loin de la vision manichéenne du conflit. On est à hauteur d'hommes avec leurs failles et leurs élans de courage. Une histoire bien menée, pas morale pour deux sous. Une histoire qui a réussi à me capter jusqu'à la fin, malgré toute la littérature que j'ai déjà avalée autour de cette période (et ça risque de continuer).
Un premier roman à découvrir.
"Today, we live" - Emmanuelle Pirotte - Le Cherche-midi - 240 pages
/image%2F0757919%2F20150925%2Fob_495c0b_tn.jpg)
14/68 - "68 premières fois", l'aventure continue...
Lire également l'avis enthousiaste de Stéphie.