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La guerre par d'autres moyens - Karine Tuil
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Et si la vérité était à rechercher dans la fiction ? C'est ce qu'affirmait malicieusement un auteur en discussion lors d'une manifestation littéraire il y a quelques jours, et c'est ce que semble sous-entendre Karine Tuil avec ce roman dense, âpre et sans concession. Un roman qui explore différentes formes de pouvoir dans une société où seuls comptent les rapports de force, l'influence, la valeur, sur une vaste place de marché qui ne dort jamais. Un pouvoir qu'elle ausculte sur des terrains politiques, artistiques mais aussi plus intimes, dans la sphère familiale et sentimentale. De toute façon les barrières n'existent plus, la porosité est reine.
En choisissant de concentrer son propos autour d'une poignée de personnages mus par l'ambition ou au contraire écrasés par l'échec, l'autrice livre un texte volontairement brutal où l'affect et les sentiments disparaissent sous les calculs. Si les blessures d'ego des hommes politiques nous sont familières, le parallèle avec les ressorts de la célébrité dans le milieu du cinéma contribue au tableau assez déprimant offert par une société où même le geste artistique est perverti par l'opportunisme et l'argent. Les rapports entre les hommes et les femmes sont au centre de cette exploration qui confronte comportements post MeToo de façade et convictions qui peuvent voler en éclats en un regard quand "on a des certitudes, des principes, des valeurs, tout semble propre et stable, mais la vie arrive pour tout pulvériser". Où se niche la sincérité dans tout ça ? Qu'il s'agisse d'engagement politique, artistique ou amoureux, comment la distinguer ? Peut-être dans les romans laisse entendre l'autrice, fine chroniqueuse de son temps, en faisant de Marianne, l'écrivaine, son personnage le plus lumineux et sans doute le plus clairvoyant, dont l'aura s'éclaire un peu plus à l'aune du geste d'écriture de son politicien d'ex-mari qualifié lui de "capitalisme littéraire".
Parsemé de quelques citations percutantes et punchlines bien senties, le roman se dévore comme un polar tandis que s'éteignent les dernières étincelles d'espoir. La peinture est cruelle, mais si réaliste. Tous ces personnages on les connaît, on les a déjà observés à plus ou moins de distance. Pas un hasard si la fiction fait office à la fois de révélateur et de refuge.
"La guerre par d'autres moyens" - Karine Tuil - Gallimard - 384 pages
Une lecture commune (ça faisait longtemps) avec Delphine sur un thème que nous apprécions en général toutes les deux.
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