La dérobée - Sophie de Baere
17 Juin 2018 , Rédigé par Nicole Grundlinger Publié dans #Romans
Encore un premier roman qui sonne juste. Tellement juste. A tel point qu'une fois terminé, il vous communique une sorte d'urgence à vous interroger sur votre propre vie, sans complaisance et sans faux-semblants. Parce que la psychologie de Claire est finement saisie, que son parcours n'a rien de bien rare et que Sophie de Baere compose un texte qui donne à voir l'intimité d'une femme enfermée dans ses propres renoncements. Tout ceci pimenté par une langue inventive, qui met les sensations en musique et les sentiments en rythme.
"On ne peut pas dire que mon existence soit un écrin de béatitudes, mais elle ne m'apparaît pas non plus comme un lourd fardeau. C'est plutôt un bain moussant qui tiédit et qu'on hésite à quitter car on s'y est trop alangui. Malgré la peau qui se fripe. Malgré la mousse qui s'étiole et nous signifie qu'il faut sortir".
Car, à 43 ans, Claire est une femme éteinte. Une femme qui a remisé la passion au fond d'une malle depuis bien longtemps et qui se laisse porter par une vie qui, sans être désagréable, manque décidément de couleurs. Dans son couple il y a de l'affection réciproque mais plus de surprise. Les liens avec sa fille sont distendus. Bref, Claire se laisse porter sans enthousiasme. Jusqu'à ce que resurgisse son grand amour de jeunesse, Antoine qui choisit justement son immeuble à Nice pour s'installer avec son épouse. Choc. Électrochoc même. Il n'en faut pas plus à Claire pour revivre ces étés où l'adolescente qu'elle était brûlait de son premier amour pour Antoine, le fils d'avocat, son premier amant. Resurgissent alors des souvenirs enfouis, des douleurs et des questions sans réponse. Comment faire face à ce nouveau bouleversement ?
Attention, on est loin d'une intrigue pour midinettes. Ce qui se joue ici est bien plus complexe. Il s'agit de tous les pièges qui font que l'on peut s'égarer sur le chemin de la vie. Des apparences, des idées reçues, des imaginations qui s'enflamment. Des drames qui enferment autant que les différences de milieux. De cette autorisation à être heureux que l'on ne se donne pas toujours, à cause de son environnement ou parce que l'absence d'un regard bienveillant aboutit à ce que l'on ne s'aime pas. Alors, comme Claire, on s'éteint. On se coule dans un rôle discret, sans faire de vague. Sans même plus espérer de prince charmant.
C'est tout ceci que met en lumière Sophie de Baere dans ce roman qui se lit d'une traite, avec beaucoup de plaisir grâce à une écriture sobre mais élégante et évocatrice. Une jolie découverte et une plume que j'aurai plaisir à lire de nouveau tant j'ai apprécié sa sonorité.
"La dérobée" - Sophie de Baere - Editions Anne Carrière - 234 pages
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