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Le revers de mes rêves - Gégory Cingal

23 Juillet 2017 , Rédigé par Nicole Grundlinger Publié dans #Romans

"A peine esquissés, nos gestes de tennis trahissent notre histoire intime, ils sont la marque irréductible de notre identité profonde, le signe irrécusable de notre présence au monde."

C'est un fou de tennis qui a commis ce livre, pour le plus grand bonheur d'autres fous de la petite balle jaune. Mais c'est un auteur, un peu philosophe, un poil poète qui tente d'expliquer ? de traduire ? de raconter ? comment cet engouement a dépassé le stade de la passion pour envahir sa vie entière. Le tennis comme un révélateur de personnalité, comme une métaphore de l'existence. Le tennis comme un fil conducteur, un truc qui le rattache à la terre. Malgré la souffrance, les désillusions, l'esclavage du joueur lambda occupé à gravir peu à peu les étapes du drôle de barème que constitue le système de classement national où les meilleurs sont "négatifs".

C'est un fou de tennis, mais pas si fou que ça. Celui qui adule McEnroe et Federer ne peut que recevoir mon admiration en retour. Celui qui peut vous raconter en détail les matchs les plus fameux de ses idoles alors qu'il ne se souvient pas de ce qu'il a mangé la veille a toute mon attention. Celui qui est capable de décrire avec tant de passion et de poésie la majesté du coup droit de Federer et la façon de voler sur un court de John McEnroe reçoit à son tour tout mon amour.

J'en ai connu plein de ces crocodiles des courts qui passent leurs soirées et leurs week-ends à écumer les tournois régionaux, rêvant de victoires épiques, se contentant de quelques succès poussifs dont ils rejoueront les moindres instants dans leur tête jusqu'au match suivant. Le tennis est un virus inguérissable. Même blessé on reste tennisman, non pratiquant c'est tout.

La balade que nous propose Grégory Cingal à travers quelques courts chapitres est une sorte d'autobiographie navigant entre réalité et fantasme, celle d'un grand enfant éternellement amoureux du jeu. Elle ne peut que ravir ceux pour lesquels comme pour lui (et moi), le tennis est une part non négociable, inextricablement mêlée à la vie quotidienne. Et représente surtout une sorte de vie idéale car "quel autre sport a la bonté d'offrir à chaque engagement une deuxième balle ?". Une autobiographie, oui. Celle d'un homme qui avoue sa difficulté d'adaptation au monde et trouve dans le tennis un refuge réconfortant, une bulle de survie.

"Le simulacre de vie qu'offre un match de tennis suffit à mon existence. Ce n'est que dans cet espace rectangulaire séparé en son exact milieu par un filet tendu à quatre-vingt-treize centimètres du sol que je me repais de la contrainte, des mille et une servitudes d'une vie au quotidien pour laquelle je n'ai aucun goût, fuyant toute espèce de responsabilités avec la même célérité que je tente de rattraper une amortie rétro. N'ayant aucun talent pour considérer le monde comme un jeu, je pratique le jeu à l'écart du monde. La seule vie convenable est dans la lecture des livres, entre les bras des femmes et sur un court de tennis."

Et si la vérité sortait de la plume d'un amoureux fou d'un tennis de rêve ?

"Le revers de mes rêves" - Grégory Cingal - Finitude - 142 pages

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D
Que tu aies aimé ce texte ne me surprend pas du tout ! Mais je ne suis certainement pas assez amateur de ce sport pour l'ajouter à mon tour à ma pal...
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N
Oui forcément, l'affinité aide :-) ... J'apprécie d'autant que le mariage entre littérature et tennis n'est pas si fréquent.