Vera - Karl Geary
26 Septembre 2017 , Rédigé par Nicole Grundlinger Publié dans #Romans
On appelle ça un roman d'ambiance je crois. Un de ces textes qui joue sur les silences, les sensations, les ombres et les lumières. Ou plutôt les tonalités, des couleurs un peu passées, des clair-obscur qui donnent aux personnages leur petite dose de mystère. C'est un roman qui saisit l'instant, dilate le temps et l'espace. Et parvient à capturer ces moments fragiles où les rêves percutent le réel et font surgir l'espoir.
Une "histoire d'amour" annonce le bandeau rouge... Oui, si l'on veut. Totalement improbable, hors cadre, voire incompréhensible pour le commun des mortels. Fragile, fugace, impossible et d'autant plus belle. Celle qui va réunir Sonny et Vera l'espace de quelques semaines à peine dans un Dublin où les banlieues pauvres côtoient les quartiers chics sans réellement se mélanger. Ils ne sont ni du même monde, ni de la même génération. Sonny est un adolescent de seize ans en déliquescence avec ses études, qui tente de s'insérer dans une société qui le rejette sans arrêt. Un père qui brûle ses maigres gains chez les bookmakers, une mère qui a oublié depuis longtemps ce qu'est la tendresse, des frères qui rêvent de le voir échouer autant qu'eux. Après le lycée il travaille en tant qu'homme à tout faire dans la boucherie du quartier et aide parfois son père dans des travaux de bricolage chez des particuliers. C'est ainsi qu'il croise Vera. Une femme que l'on imagine autour de la quarantaine, toujours belle mais qui promène un air de lassitude qui intrigue Sonny autant que sa beauté le subjugue.
Entre ces deux-là se noue une relation particulière, faite d'attirance, de tristesse et de tendresse. Auprès de Vera, Sonny oublie le quotidien qui l'étouffe et l'emprisonne, il entrevoit la possibilité d'un autre monde que la grisaille sans espoir qui l'entoure. Et Vera ? Que cherche-t-elle ? Quel drame essaie-t-elle d'oublier ou de dépasser ? Malgré l'hostilité palpable du monde extérieur, ils capturent quelques instants, comme une bulle de réconfort. De quoi trouver le courage de continuer... ou de changer.
C'est bien une ballade irlandaise que nous chante Karl Geary dans ce premier roman qui ne cède en rien à la facilité et dont on capte si bien les images que l'on imagine tout de suite un film. L'arrière-plan social l'ancre dans la triste réalité tandis que les moments volés par Vera et Sonny donnent envie de croire qu'il suffit parfois d'une rencontre, et surtout de s'accrocher à ses rêves. C'est un beau roman, cruel, âpre mais subtilement lumineux.
"Vera" - Karl Geary - Rivages - 256 pages (traduit de l'anglais (Irlande) par Céline Leroy)
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