Boys - Pierre Théobald
On entre dans Boys avec l'intention de picorer quelques nouvelles, pour voir. Un truc qui ne parle que de mecs, c'est intriguant. Et puis on tombe dans le piège de l'auteur, cette toile qu'il tisse avec tous ces fils qui finissent par se croiser, se compléter, se recouper. Tiens, Samuel. On l'a déjà vu lui... Et nous voilà faisant marche arrière pour s'en assurer. Ah oui. Il y a bien des dates en ouverture des textes qui mettent Samuel en scène. Intéressant. Voilà donc un fil rouge. Samuel à plusieurs époques de sa vie. Mais... attends. Cette Astride, c'était pas déjà la femme d'un autre ? Et hop, nouvelle marche arrière. Et ce ne sera pas la dernière fois. Du coup, on n'est plus très sûr. Nouvelles ou roman choral ?
Car tous ces mecs que l'on croise le temps de quelques instantanés de vies, pourraient être un seul et unique. Peu importent leur prénom, leur origine sociale, leur âge. Ce sont leurs tripes que l'auteur ausculte. Leurs bides. Là où se logent les envies, les angoisses, les manques, les peurs, les chagrins et puis l'espoir parfois. Là aussi où il manquera toujours un truc, cet embryon qui grandit lentement pour devenir un enfant. A travers ces instantanés, ces mini portraits, Pierre Théobald part à la rencontre des émotions et des désirs de ces hommes qui sont des fils, des amants, des amis, des maris, des pères. Ou qui aspirent à le devenir. La paternité. Un thème qui sous-tend l'ensemble tant son exploration prend soin d'aborder toutes les facettes. Le père qui rejette, le père abandonné, le père qui veut briller aux yeux de ses enfants, le père en deuil... Il est question d'espoir et de renoncement. D'amour surtout. D'amour beaucoup.
Il y a cette construction en forme de kaléidoscope, assez difficile à expliquer mais tellement remarquable. Il y a l'émotion qui affleure au contact des failles qui se dévoilent. Il y a la quête de Samuel et la façon dont il deale avec les surprises du destin. Il y a ce regard tendre de l'auteur sur ces mecs qui n'ont rien de héros du quotidien, prêts à basculer du côté des loosers mais tenus par ces fils invisibles mais bien réels qui les rattachent à d'autres. Ce je ne sais quoi qui vous chavire le cœur. Et puis, il y a le dernier texte. Les mots de Samuel. Qui m'ont percutée.
On entre dans Boys avec l'intention de picorer et on en sort à regret avec l'envie de s'y lover à nouveau. Un truc un peu dingue, quoi. Doux aussi.
"Boys" - Pierre Théobald - JC Lattès - 250 pages
L'enthousiasme de Clara fait plaisir à lire également.