Elizabeth Finch - Julian Barnes
20 Décembre 2022 , Rédigé par Nicole Grundlinger Publié dans #Romans
Quand je décide de me garder le dernier Julian Barnes pour les frimas, comme on se garde un bonbon pour la note gourmande je suis sûre de mon coup. Finesse, élégance, profondeur et intelligence. Sans oublier la petite touche d'humour. Cocktail garanti, les ingrédients changent mais pas la manière. Lire Julian Barnes c'est autant un plaisir qu'un enrichissement de l'esprit. Le seul risque à tenter d'en parler est de se sentir bien moins intelligent que lui.
Dans ce dernier opus, il met en scène la relation et la fascination intellectuelle d'un ancien élève pour sa professeure, Elizabeth Finch au sein d'un cursus pour adultes. Neil a déjà une trentaine d'années et un parcours professionnel décousu lorsqu'il suit ce cours intitulé "Culture et Civilisation". Elizabeth Finch est un professeur iconoclaste qui s'attache surtout à ouvrir l'esprit de ses étudiants en les incitant à questionner et à explorer les différentes facettes des vérités historiques pour mieux tenter d'appréhender le monde. A se méfier du préfixe "mono" par exemple ou à se souvenir d’Épictète pour ce qui dépend ou ne dépend pas de nous. Avec parfois des références étonnantes comme lorsqu'elle invite à lire Hitler. Captivé, Neil continuera à déjeuner avec elle deux ou trois fois par an bien après la fin de son enseignement, tentant de percer l'aura de mystère qui entoure cette femme solitaire, au caractère affirmé mais secret. A sa mort, il héritera de ses livres et de ses papiers dont beaucoup de notes autour de Julien l'Apostat, et se fera fort de marcher dans ses traces sans trop savoir ce qu'il cherche.
Encore une fois, Julian Barnes nous offre un texte hybride qui joue avec les notions de réalité historique et de fiction en interrogeant la fabrication des récits. C'est un thème qui revient très souvent chez lui, tout comme celui des traces que nous laissons et la façon dont on se souvient de nous. Le plaisir du cheminement est nourri d'emprunts philosophiques et historiques ainsi que de l'étude du personnage de l'empereur romain Julien l'Apostat, prétexte à s'interroger sur la façon dont l'histoire se serait écrite si sa préférence pour les religions polythéistes avait empêché l'emprise du christianisme. "Il faut toujours garder à l'esprit ce qui aurait pu arriver, autant que ce qui s'est produit" professait Elizabeth Finch, ne pas oublier que l'Histoire est écrite du point de vue des vainqueurs.
En fait ce genre de lecture ne se raconte pas, elle agit comme une potion revigorante pour l'esprit, ingurgitée avec le sourire en compagnie du plus charmant guide qui soit.
"Elizabeth Finch" - Julian Barnes - Mercure de France - 198 pages (traduit de l'anglais par Jean-Pierre Aoustin)
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