Coriolano - Histoire des Beati Paoli (3) - Luigi Natoli

Il se sera donc écoulé deux ans avant que je n'entame l'ultime partie de cette saga hautement romanesque en trois volumes et quelques 2500 pages. Il est clair qu'après cette lecture, je n'aborderai pas Palerme de la même façon si je retourne un jour en Sicile. Je risque d'avoir des images plein les yeux de ce 18ème siècle incroyablement mis en scène, que ce soit en termes de décor ou de costumes, ou encore de personnages. J'avoue néanmoins que ce troisième volet m'a semblé un peu longuet, car centré assez exclusivement sur des histoires d'amour et d'honneur et délaissant le contexte politique qui faisait la richesse de la première partie Le bâtard de Palerme et était déjà moins présent dans le second volet La mort à Messine.
Je m'aperçois au moment d'écrire ce billet qu'il m'est presque impossible de parler de l'intrigue si je ne veux pas déflorer le plaisir de ceux qui n'auraient pas encore débuté la saga. Car autant le deuxième tome faisait un bond de quarante ans après la fin du premier, autant là, c'est un parfait enchainement, reprenant l'histoire là où nous l'avions laissée à la fin de La mort à Messine. Nous sommes autour de 1770/1780 et cette fois, l'intrigue quitte très rarement Palerme ou ses environs, mettant néanmoins l'accent sur l'organisation de la société, et notamment du peuple de petits commerçants et ses confréries de métiers. Il souffle dans les rues de Palerme un petit vent de révolution... mais à l'italienne, avec force démonstrations et théâtralité. On sourit parfois autant de cette comedia del arte que du décorum qui entoure le moindre déplacement du plus petit nobliau du coin. Quant à l'étiquette... Voilà pour la toile de fond. L'essentiel étant tout de même de savoir si Cesare de Brancaleone pourra enfin épouser Giovanna, fille du Marquis d'Oxorio. Je ne vous cache pas qu'à l'entame du volume, c'est mal parti. La belle est enfermée dans un couvent et pas très bien traitée, ses parents vouent une haine féroce au jeune homme qui, heureusement, outre ses qualités chevaleresques possède des alliés puissants, dont le fameux et mystérieux Frère Benedetto (cf tome précédent) qui n'a pas toujours été un saint homme... Quant aux Beati Paoli, loin d'avoir disparu, ils veillent toujours dans l'ombre à réparer les injustices causées par certains ambitieux prêts à tout.
Il y a un côté Le bossu de Paul Féval dans ce dernier tome, même si les émeutes et les coups de feu ont remplacé les duels. Mais le coup de la belle en détresse, des fausses identités, du combat pour le rétablissement dans ses droits... La dose de romanesque est tout de même très forte ici puisqu'il faut bien arriver à un happy end.
Autant j'avais gardé un très fort intérêt du début à la fin pour les deux premiers tomes, autant je me suis un peu lassée avec celui-ci qui laisse de côté la politique et n'explore pas plus avant les ressorts de cette organisation secrète que l'on présente comme l'ancêtre de la mafia et sur laquelle j'aurais aimé plus de détails. Ceci dit, l'ensemble représente une fresque assez incroyable, représentative de toute une époque et apportant un éclairage intéressant pour quiconque a déjà tenté de percer les mystères de la Sicile et de ses multiples influences. Je suis donc ravie d'en être venue à bout, et ceci grâce au mois italien organisé chaque année par Martine et qui me permet de développer un peu mon exploration de la littérature italienne.
Pour ceux qui voudraient se lancer, il est tout à fait possible de s'arrêter au premier tome, Le bâtard de Palerme, qui se suffit à lui-même. Et si vous aimez Alexandre Dumas alors c'est incontestablement une expérience à tenter !
"Coriolano" - Histoire des Beati Paoli (3) - Luigi Natoli - Métailié - 912 pages (traduit de l'italien par Jacqueline Huet et Serge Quadruppani)