La princesse au petit moi - Jean-Christophe Rufin
Grrrrrrrrrrrrrr !!!!!
Ça c'est le cri de la lectrice frustrée qui s'est fait voler sa récréation. Très en colère, la lectrice, fidèle de Jean-Christophe Rufin et qui commençait à s'attacher aux aventures d'Aurel. Elle savait, la lectrice fidèle que cette série sans grande prétention permettait à l'auteur de piocher dans sa propre expérience et de se défouler un peu. Mais elle appréciait que l'on sente toujours la patte Rufin, et que suivre ce personnage improbable soit l'occasion d'aller farfouiller dans les méandres de la géopolitique compliquée de certaines régions du monde. On s'amusait mais on apprenait des choses. On a "fait" la Guinée, le Mozambique et l'Azerbaïdjan. On a exploré de sombres histoires de trafics, de politiques corrompus et de multinationales destructrices et avides de profits. Et puis la lectrice (tout comme les personnages féminins des intrigues d'ailleurs) aimait bien Aurel, elle trouvait que le personnage prenait de la chair au fil des épisodes, que sous ses abords ridicules sa cachait un esprit malin et attachant nimbé d'une aura poétique. Plus Bartleby que François Pignon. Et patatras.
Voilà qu'avec ce quatrième épisode tout semble oublié. Pas d'exploration, mais un décor d'opérette, une Principauté imaginaire résultat d'une hybridation entre Monaco et le Luxembourg, une intrigue sans aucun intérêt et bourrée de clichés (une princesse filoutée par un don Juan de pacotille, non mais vraiment ? On en est là ?) qui en plus met plus de 200 pages à démarrer (c'est long, vraiment long). Et le pire c'est le traitement réservé à Aurel. Le pauvre n'a plus aucune consistance. En le sortant du milieu consulaire dans lequel il évolue d'habitude (et qui faisait le sel de la série), l'auteur en fait une sorte de marionnette ridicule et se complait à accentuer ce ridicule par des détails physiques vraiment limites (franchement, les poils autour du nombril ça a de l'intérêt pour qui ?). Il voudrait le tuer qu'il ne s'y prendrait pas autrement. Adieu l'humour, bonjour la lourdeur.
Je ne sais pas ce que l'auteur a voulu faire avec cet épisode, mais c'est raté. Tout ce qui faisait l'intérêt de la série a disparu. Remboursez ! C'est ce que j'avais envie de crier en refermant le livre (20 € tout de même). Un jour j'ai entendu l'auteur dire que ses éditeurs ne lui faisaient jamais de retour négatif et que pour lui c'était difficile d'avoir un avis sincère sur ses manuscrits : ici, cela aurait mérité un vrai conseil. Quoi qu'il en soit, faute de remboursement j'aimerais au moins éviter la dépense à celles et ceux qui me lisent : contentez-vous des trois premiers volets des aventures d'Aurel.
"La princesse au petit moi" - Jean-Christophe Rufin - Flammarion - 380 pages