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C'est là que vous disparaissez - Chloé Aeberhardt
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"Disparaître pour vivre libre, n'être personne pour exister vraiment".
Disparaître. S'extraire du monde. C'est la première idée qui vient à l'esprit de Charlie Archambault, journaliste vedette d'un grand quotidien français lorsque la falsification du reportage qui l'a rendue célèbre est démontrée et que l'opprobre médiatique se déchaîne. Elle prend alors la direction d'un village du Haut-Valais et de la clinique psychiatrique où son écrivain préféré, Robert Walser s'était retiré pour passer les vingt dernières années de sa vie. Son directeur, Joseph Merveille vit depuis trente ans avec le remord de n'avoir pas décelé la pulsion suicidaire d'une jeune patiente, Lotte dont on n'a jamais retrouvé le corps dans le lac où elle s'est volontairement jetée. Lotte qui voulait simplement rester dans le bureau de Joseph et lire ; ne surtout pas grandir. Cette retraite va avoir sur Charlie des effets en cascade dont il serait dommage de dévoiler la teneur au risque de gâcher le plaisir du futur lecteur.
Disons que la question du sens de l'existence est au cœur de ce roman qui n'hésite pas à dynamiter le carcan d'injonctions dans lequel nous vivons, entre obligations d'avancer, de remplir les heures, d'accomplir, de se réaliser. Vous savez le fameux "être entrepreneur de soi"... Je l'affirme haut et fort : j'adore Charlie, sa ténacité à se contenter d'être plutôt que devenir. Pour son premier roman, Chloé Aeberhardt - journaliste de son état - crée un univers assez ébouriffant, garni de personnages hauts en couleurs qui ne sont pas sans illustrer les travers que nous côtoyons au quotidien dans le carnaval pas toujours reluisant du monde. Rien n'est anodin entre l'utilisation des masques, le folklore de la bourgade, l'opposition entre conservateurs et partisans du changement ou la création de la filière d'extraction/disparition mise en œuvre par Charlie. Les amoureux de littérature apprécieront les références, le réconfort et l'inspiration puisés par Charlie dans ses lectures. Moi je me suis régalée au cours de ces quelques heures passées planquée en Suisse dans cette communauté improvisée qui interroge avec humour les façons de se rebeller contre les figures imposées. Non seulement j'adore Charlie mais je suis Charlie, en lice pour le trophée du meilleur personnage de l'année.
"C'est là que nous disparaissons" - Chloé Aeberhardt - Denoël - 378 pages
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