Avant les diamants - Dominique Maisons
Je suis assez impressionnée par la capacité de Dominique Maisons à immerger son lecteur dans des univers, des décors et des époques aussi différentes que le Paris des feuilletonistes de 1900 (On se souvient du nom des assassins) et le Hollywood des années 50. Tout ceci sur des rythmes trépidants et en épousant parfaitement les codes de chaque genre. Dans Avant les diamants, on croise Errol Flynn, Kim Novak, Hedy Lamarr ou Clark Gable, mais surtout, on plonge dans les coulisses des studios à travers des enjeux qui dépassent largement le cadre du divertissement ou de l'argent que cela peut rapporter. C'est passionnant et cela mériterait bien une adaptation cinématographique.
Il sera donc question de tournages, de starlettes qui rêvent de gloire et doivent se contenter de jouer les potiches au bras des producteurs de seconde zone, de combines et de jeux d'influence. D'argent aussi, bien sûr. Dont on ne regarde pas toujours la couleur lorsqu'il s'agit de financer le film que l'on veut tourner à tout prix. Marécage idéal pour les familles mafieuses qui se partagent le territoire dans un relatif équilibre. Jusqu'à ce que l'armée s'en mêle. Son but ? Utiliser le cinéma pour promouvoir une image idéale de l'Amérique à travers le monde et s'assurer que les américains orientent bien leurs vies dans le sens voulu par le pilote. Quitte à frayer avec du peu recommandable. Propagande ? En quelque sorte. Ou disons plutôt une manipulation à grande échelle. Les processus sont impeccablement décrits et irriguent l'intrigue qui mêle les destins d'un major de l'armée un peu trop joueur, d'un producteur un peu loser, de quelques mafieux, impresarios et proxénètes. Sans compter les jeunes actrices et acteurs prêts à tout dont les illusions vont peu à peu s'effondrer. Hollywood, ton univers impitoyable. Jusqu'à un final "tarantinesque", magistralement orchestré.
C'est du roman noir comme je les aime, intelligent et instructif. On ne s'ennuie pas une seconde, on s'amuse des rôles joués par les stars mondialement connues qui dévoilent des facettes inédites. On dit parfois que la réalité dépasse la fiction, là je dirais que le roman dépasse le cinéma tant il utilise ses codes pour délivrer un texte à grand spectacle. Qui pourrait lui-même finir sur grand écran. Et dont je vous recommande chaudement la lecture en ces temps où les distractions de qualité sont les bienvenues.
"(...) Je veux que chaque mois, des gamins dans le monde se précipitent au cinéma pour aller voir des soldats américains rétablir l'ordre et la paix. Nous sommes le camp du bien, il ne doit y avoir aucun doute là-dessus. Nous sommes la force du juste au service du plus faible et de la paix. Vous savez qui a dit "Qu'on me donne le cinéma américain et je n'aurai aucun mal à convertir le monde au communisme." ? - Non, mon général - Staline lui-même. "
"Avant les diamants" - Dominique Maisons - Editions de La Martinière - 522 pages