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Hotel Andromeda - Gabriel Josipovici

12 Avril 2021 , Rédigé par Nicole Grundlinger Publié dans #Romans

A Londres, l'appartement d'Helena est situé au-dessus de celui de Tom avec lequel elle semble entretenir une relation épisodique peut-être plus intellectuelle que charnelle et en-dessous de celui de Ruth, une vieille dame avec laquelle elle aime venir papoter autour d'une tasse de thé (nous sommes en Angleterre). Helena est historienne d'art, auteure de plusieurs essais biographiques sur des artistes ; son sujet actuel est l'américain Joseph Cornell connu pour ses étranges boîtes-collages (là, je vous raconte ça comme si je savais qui il était, or je dois avouer mon ignorance crasse qui m'a valu de demander un peu d'aide à Google) et Helena peine à avancer malgré son admiration pour le personnage et son travail. Il faut dire que la jeune femme s'interroge sur son utilité dans la vie, elle dont la sœur, Alice travaille dans un orphelinat en Tchétchénie (l'histoire de l'art n'est-ce pas une occupation futile alors que tant d'individus souffrent sur cette planète ? Nous y reviendrons.). L'arrivée d'un photo reporter, Ed qui se dit envoyé par Alice et en quête d'un hébergement pour quelques jours va offrir à Helena un nouvel interlocuteur auprès duquel se confronter à ses questions existentielles. Petit à petit s'esquisse une sorte de dialogue entre les échos de territoires en guerre reflets du chaos du monde et les souffrances de l'artiste en proie aux affres de la création. Les questions d'Helena sur elle-même percutent le parcours de Joseph Cornell que le lecteur découvre sous sa plume (et là, je dois vous rassurer car je vous vois déjà froncer les sourcils, craindre le pensum ou la diarrhée intellectuelle... Je vous arrête tout de suite, tout ceci se fait le plus souvent sous la forme de savoureux dialogues teintés d'une réjouissante ironie toute britannique).  Et ces conversations nourrissent la réflexion d'Helena sur la meilleure façon de mettre en lumière la vie et l’œuvre de Cornell qui elle-même semble intervenir comme un antidote à la laideur.

J'avoue que l'ensemble est assez fascinant et que j'ai passé de longs moments sur internet à me balader parmi les fameuses boîtes après avoir appris à partir de quels matériaux l'artiste les concevait. La réflexion sur la place de l'art et de la culture dans nos vies est souvent centrale, elle n'est pas nouvelle mais c'est la façon dont elle est traitée par cette sorte de mise en abyme qui en fait toute la singularité et la saveur. Ajoutons à cela une atmosphère délicieusement anglaise, un art du dialogue des plus réjouissants qui donnent à la profondeur de l'ensemble un air de ne pas y toucher. Vraiment anglais, donc.

"J'ai grandi en pensant que l'art, c'était "le beau", écrit-elle, mais ce n'est pas du tout cela. L'art est ce qui nous permet d'exprimer ce qui est enfoui si profondément à l'intérieur de nous-mêmes qu'on ne peut jamais trouver ni les sons ni les images ni les mots pour en rendre compte, et auquel, par conséquent, on ne pourrait jamais avoir accès sans l'aide des autres, les artistes. C'est pourquoi ils sont si importants pour nous. C'est pourquoi Cornell est si important pour moi."

"Hotel Andromeda" - Gabriel Josipovici - Quidam éditeur - 174 pages (traduit de l'anglais par Vanessa Guignery)

 

 

 

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I
J'ai beaucoup aimé "Dans le jardin d'un hôtel", de cet auteur.. je note celui-là !
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N
Et de mon côté je note ta référence pour mon exploration de l’œuvre de cet auteur :-)
K
Si c'est 'anglais' c'est ma tasse de thé! ^_^
Répondre
N
Of course :-)