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Arène - Négar Djavadi

1 Août 2021 , Rédigé par Nicole Grundlinger Publié dans #Romans, #Coups de coeur

Je suis d'autant plus impressionnée par ce roman que je n'avais pas été emballée par Désorientale, le premier roman de Négar Djavadi. Ici, tout est fort, brillamment ajusté, percutant. Le contexte, l'unité de lieu et le parti-pris narratif m'ont parfois fait penser à l'ambitieux Les lois de l'ascension de Céline Curiol mais la comparaison s'arrête là, chacun de ces deux romans ayant une personnalité propre et bien affirmée, et Arène s'inscrivant dans un temps très court pour mieux mettre en évidence la folie de la course au temps de nos sociétés modernes.

Ce temps qui s'emballe en quelques secondes autour d'un fait divers dans un quartier sensible de l'est parisien : le corps sans vie d'un adolescent retrouvé au petit matin, et un concours de circonstances qui va impacter les vies de Sam la policière, Camille la lycéenne et bien d'autres qui gravitent dans le périmètre. Sans oublier celle de Benjamin Grossmann, qui s'était pourtant extirpé de ce quartier de son enfance, Benjamin devenu cadre influent chez BeCurrent, l'une des plus importantes plateformes de diffusion de séries, Benjamin qui n'aurait peut-être pas dû rendre visite à sa mère ce soir-là. A partir de là, l'auteure met en scène un emballement haletant au cœur d'une société devenue celle du spectacle et du divertissement, où l'image est reine. La ville se transforme en arène avec des citoyens chauffés à blanc. Une société où l'on conçoit des séries à tour de bras pour mieux détourner l'attention des réalités, où il suffit d'une vidéo postée sur les réseaux sociaux pour déclencher un lynchage médiatique, où les scénaristes de cinéma sont désormais au service des hommes et femmes politiques...

Ce qui impressionne c'est la densité de l'ensemble, la façon dont l'auteure encapsule la modernité à travers des personnages à la fois représentatifs et incarnés. Tout y est : la contrainte économique, l'enfermement, la pression que subit chacun à son niveau et qui entraîne la peur, la manipulation, la violence ou l'erreur. C'est redoutablement intelligent, grâce à des ingrédients qui nourrissent le fond et facilitent grandement la projection, et à une écriture très cinématographique qui mène l'intrigue dans un crescendo captivant et addictif. J'ai particulièrement apprécié le questionnement induit sur la société du divertissement, le règne du storytelling auquel chaque citoyen apporte sa pierre sans forcément en être conscient. On ne s'ennuie pas un instant, j'ai adoré.

"Arène" - Négar Djavadi - Liana Levi - 428 pages

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K
Je l'ai noté depuis un petit moment, je n'avais pas voulu lire Désorientale, mais celui-ci me tente...
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N
Moi je me méfiais à cause de Désorientale et... bonne pioche :-)
D
Je l'ai dévoré aussi, moi qui, comme toi, n'avais pas été emballée par Désorientale.
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N
C'est assez intéressant de voir comme les deux n'ont pas grand chose à voir, sur le fond bien sûr mais également sur la forme.
K
Noté pour un emprunt en médiathèque... Je n'avais pas trop apprécié Désorientale, mais je vois que c'est ton cas aussi, ses romans semblent fort différents les uns des autres.
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N
Je ne pensais pas le lire suite à mon manque d'enthousiasme pour Désorientale, mais le sujet me tentait donc j'ai essayé et j'ai été tout de suite ferrée. Les deux sont très différents, notamment sur la forme. J'avais trouvé Désorientale un peu brouillon, fouillis et très bavard alors que Arène est construit au cordeau, dense mais superbement conduit. Je pense qu'il devrait te plaire.